Au  lecteur

Vous vous apprêtez à découvrir un récit pétri par de grands destins qui se rencontrent, dans le trouble de l’Histoire, l’authentique Histoire.

"Qui est-il, celui-là ?", vous demandez-vous peut-être, à mon instar, "pour nous raconter cette histoire ?". Cela n’a guère d’importance car mon nom n’est pas inscrit dans le bronze éternel. Ce qui compte, en revanche, c’est que je suis ce conteur de l’Histoire, cet homme témoin des actions de ses frères en humanité, de tous ces événements qui avaient été forgés par l’esprit de quelques-uns et qui sont devenus la mémoire de tous les autres...

Qui connaît réellement le passé ? Plus que la vérité des faits, c’est la vérité de l’humain que je veux décrire dans ces lignes. L’histoire que je m’en vais vous conter est donc votre histoire, non seulement parce qu’elle est votre passé, parce qu’elle vous conduira sur les lignes du légendaire Empire romain aux mille contrées mais aussi parce qu’elle vous révélera les obscurs détours du génie humain, qui n’est jamais bon ou mauvais totalement mais dont la trajectoire est toujours exemplaire. Je serai ainsi votre guide dans ce monde lointain et familier à la fois, pour peu que vous me suiviez sur la voie de l’épopée de Silius.

J’aurais pu choisir de vous narrer l’histoire de Claude, l’empereur romain qui succéda à Caligula au premier siècle de notre ère mais d’autres ont déjà fait ce choix, bien avant moi, ayant souvent insisté sur sa vie privée. Au contraire de cela, mon récit se situe dans cette faille du pouvoir, dans l’ombre de Claude, à l’heure où l’on pense à sa succession. Tout commence quelques mois après ce fameux débarquement sur l’île de Britannia.

Au printemps de la quarante-troisième année de notre ère, à l’extrême nord-ouest de la Gaule, 80 000 hommes avaient embarqué sur une flotte composée de 800 navires sous les ordres du légat Aulus Plautus. L’invasion de Britannia venait de débuter. L’Empire romain, qui s’étendait alors, du nord au sud, de la partie la plus septentrionale de la Gaule jusqu’au Maghreb, avait pris frontière à l’ouest au niveau du Danube. Claude était à la tête de ce super empire. Il avait été porté sur le trône par le bon vouloir d'une poignée de prétoriens conspirateurs qui avaient assassiné son prédécesseur. Certains de ces prétoriens, naïfs, jouèrent de calomnie et dirent de cet Empereur, qui était avant son intronisation un homme peu connu, issu de Lugdunum, qu'il n'était qu’un bègue peureux et simple d’esprit. Ce furent ces mêmes prétoriens qui, quatre ans plus tard et moins de deux ans après le débarquement, portèrent Claude en triomphe, quand ce soi-disant "simple d’esprit" entrera dans certaine ville à dos d’éléphant pour faire bien montre de sa force et asseoir sa puissance, son pouvoir sur l’île de Britannia.

Mais d’autres événements se trament sur une île voisine de Britannia, une île méconnue nommée Hibernia. Écoutez plutôt ce qui va suivre…